Marche de Yewwi : Les germes d’un report
La manifestation de l’inter-coalition Yewwi Walu prévue ce mercredi un peu partout dans le pays a été interdite par les préfets de différents départements (Dakar, Zig…). Les leaders de l’opposition qui avaient coutume de réagir rapidement ont, cette fois-ci, gardé le silence. La coalition Yewwi Askan Wi invite la presse à une conférence de presse à 11h. De quoi espérer une baisse de tension. Certaines parutions de la presse du jour annoncent déjà un possible dégel.
Quoi qu’il en soit, si le pouvoir n’a pas raison d’interdire la manifestation (le dixième du dispositif déployé suffit pour encadrer une marche pacifique) il y a suffisamment de raisons de la part de l’opposition d’éviter de braver cette interdiction.
Hier, les acteurs de l’école ont appelé à prendre en compte la situation dans laquelle se trouvent les élèves. En effet, le baccalauréat technique a démarré lundi dernier et se poursuit. Or, une manifestation risque de causer des dommages à ces candidats. Dans certaines circonstances, ces derniers pourraient même avoir du mal à se rendre dans les centres d’examen. En plus de ces risques, ils ont besoin de concentration pour mieux traiter les épreuves.
Il faut reconnaître cependant que si on se base sur les examens, l’opposition ne pourra plus organiser de marche d’ici les élections législatives prévues le 31 juillet. Car, après le bac technique, il y a le bac général prévu à partir du 15 juillet. Une semaine après, c’est le Bfem. Si l’on y ajoute les seconds tours des deux examens, cela veut dire que les épreuves iront au moins jusqu’au-delà de la fin du mois de juillet. Chaque partie appréciera donc !
L’autre argument de taille qui pèse sur la balance est le contexte actuel de préparatifs de la tabaski. Il suffit de sillonner les rues de Dakar pour voir que les moutons sont partout exposés. La plupart des propriétaires n’ont pas un endroit où préserver leurs biens en cas de manifestations.
Or, outre les dégâts collatéraux qui peuvent être considérables, il y a le risque d’infiltration de ceux qui voudraient profiter de cette occasion où les biens des éleveurs sont plus que jamais exposés. Tenir cette manifestation en bravant les interdits revient donc à faire courir le risque à ces gens-là de perdre, au meilleur des cas, l’occasion de faire les bénéfices annuels tant espérés, au pire des cas, de perdre le bénéfice et le capital à la fois.
Compte tenu de tout cela, l’opposition serait bien inspirée de surseoir à cette manifestation, sachant que beaucoup parmi ces jeunes sur qui elle compte pour les manifestations sont intéressés par l’opération tabaski. Tout cela sans compter les tailleurs déjà confrontés à des coupures de courant et qui ont besoin de plus de quiétude pour respecter les délais de livraison.
Bref, comme l’a déjà démontré la résistance que les marchands ambulants ont opposée au pouvoir d’Abdoulaye Wade en 2009 (Khalifa Sall en sait quelque chose), la période de tabaski est un moment important pour la jeunesse sénégalaise confrontée au chômage, au sous-emploi et à la précarité au travail. Prendre le risque de lui faire perdre ce moment, c’est aussi prendre le risque de se mettre à dos cette jeunesse.